Entrer dans la concordance du vivant ne relève pas d’une contemplation mystique mais d’un défi quotidien, d’une volonté alchimique où la matière brute du désir se transmute en puissance d’incliner en faveur de la Vie l’incertitude des circonstances.
Nombre d’évidences prennent des siècles parfois avant de se manifester.
Nous n’acceptons du monde que ce qui renait à la Vie.
Nos désirs n’auraient pas de fin si nous ne mettions tant de soin à leur en assigner. L’ignorance dont nous les entourons abrite le plus souvent la vocation de nous abîmer en regrets. C’est ainsi que la mort et le morbide viennent avant l’heure.
L’état de résignation, d’où viennent tous les malheurs, a accoutumé de regarder le bonheur comme une brève éclaircie dans le ciel de l’ordinaire tyrannie. Les moments heureux ont toujours été reçus avec cette méfiance qu’éveillent l’insolite clémence de la fatalité et le caprice de ceux qui s’arrogent le pouvoir de les dispenser. Rien ne changera que dès l’instant où nous nous mettrons tout à la fois dans la tête et dans le corps que le bonheur ne s’acquiert pas comme une prime de retraite, qu’il relève d’une création permanente où il ne doit rien qu’à lui-même.
La meilleure façon d’ôter la satisfaction au désir, c’est de l’espérer au lieu de la vouloir sans fin.
On meurt de lassitude à ne s’atteindre jamais. Qui arrive en revanche à se tenir au centre de sa vie comme au point d’une gravitation universelle échappe en un moment à xet éparpillement de l’espace et du temps qui caractérise la « survie ». Toute création de soi part de cette situation –là pour la construire.
Nous cédons trop aisément à une réaction de défense ; Rechercher une « protection », c’est inviter l’ennemi chez soi sous prétexte de l’amadouer. A invoquer la peur, on pénètre sur un terrain de chasse. Seul le patient exercice de la volonté de vivre dissipe la crainte que parsème une « nécessité » qui n’est pas la nôtre.
Tu peux tout parce que tu ne dois rien .
Nous n’avons besoin ni de prières ni d’incantations mais d’un sens plus aigu de la poésie vécue.
Il s’agit de pratiquer une opération quotidienne où prime sur toute préoccupation le soin de choisir ses émotions, ses sentiments, ses sensations, ses désirs afin d’en tirer par transmutation cet or de la jouissance qui es l’éternelle présence de la Vie !
L’intelligence sensible dissout la carapace caractérielle où les désirs s’emprisonnent.
Se demander ce qu’il va advenir est une manière de s’égarer au lieu de courir à l’essentiel : vouloir à toute force qu’il n’arrive rien que de satisfaisant et d’heureux.
Nous ne voulons pas être les meilleurs, mais nous créer la meilleure des vies possibles.
La connaissance de soi commence avec l’identification de ses vrais désirs. Affiner les sollicitations de la Vie jusqu’à ce qu’elles soient la Vie même coupe au plus court dans les méandres où phobies, fantasmes, angoisses, troubles, déséquilibres et états morbides dessinent sur le territoire du vivant la carte de la mort. L’attrait des jouissances est le seul fil d’ariane.
Savoir ce que tu veux, vouloir ce que tu sais. C’est là tout le secret de l’autonomie et tout le principe d’une éducation où il s’agit d’apprendre à apprendre seul.
La conscience sensible du vivant fonde un nouveau mode de perception dont la pensée et l’action sont solidaires.
Il n’y a qu’une seule bataille, celle du vivant contre le morbide. Cette bataille, la seule qui vaille, ne mobilise ni la force brutale ni la ruse. Elle ne repose sur aucun projet, aucun plan d’action. Elle se joue entre un dépérissement des choses, une lassitude des êtres, qui convainc de mourir, et la renaissance permanente d’une vie qui ne cède pas, s’arroge des droits, progresse par sa tranquille persévérance à ignorer les entraves...