Nous voulons être les poètes de notre vie, et celà avant tout dans les petites choses de la vie quotidienne.
Le gay savoir
Nous voulons être les poètes de notre vie, et celà avant tout dans les petites choses de la vie quotidienne.
Le gay savoir
Jean-Claude Pirotte vient d’être distingué par le Soixante-treizième prix Apollinaire , pour deux recueils, exception confirmant la règle , parus cette année . Voici bientôt cinquante ans qu’il pérégrine dans les territoires de la poésie, jalonnant son exploration de presque autant de recueils ou de romans. Le pays qu’arpente, de façon buissonnière, Jean-Claude Pirotte pourrait s’appeler Le pays où l’on n’arrive jamais d’André Dhotel, prédécesseur admiré au point de se considérer comme un de ses personnages. Car s’il est vrai que, pour savoir écrire, il faut savoir lire, Jean-Claude Pirotte n’en finit jamais de rendre hommage à ceux dont il s’est nourri, qu’ils s’appellent Follain, Larbaud, Chardonne, Fargue, Lubin et plus loin, Rutebeuf et Villon. Poésie du quotidien, poésie de la banalité, c’est de touches légères, impressionnistes, de couleurs d’aquarelle, que Pirotte peint les jours, la solitude et la nostalgie avec une palette diaphane et nuancée. Dans ces pages où Pirotte dit le vent, les saisons, l’ombre et la lumière, le temps est immobile et il est toujours l’heure d’aller à Elseneur /retrouver Larbaud dans un bar/ oublié du temps….A votre santé, Monsieur Pirotte.
Alain-Jacques Lacot
Magazine Littéraire
Janvier 2012
Jean –Claude Pirotte . Cette âme perdue. Editions Le castor astral . 2011. 13 E . Isbn 978-2- 85920-865-3 . Autres séjours. Editions Le temps qu’il fait. 18 E 978-2-86853-534-4.
Depuis des décennies, Francis Combes arpente le monde pour porter la parole poétique. Il est éditeur (Le temps des cerises), vigneron aussi, qui trousse des quatrains bachiques pour en faire les étiquettes de ses bouteilles(Le vin des hirondelles. Editions Le petit Pavé), mais d'abord poète. Les vendanges qu'il a faites cette année sont celles de l'amour. Enracinant ses vers dans le terreau de l'amour courtois, il revisite toutes les facettes de ce sentiment universel, de l'amour fou à l'amour besoin; au contraire d'un Aragon chantant le malheur d'aimer, il célèbre , lui, le bonheur d'aimer sous toutes ses formes. Ce n'est pas Elsa qu'il célèbre, c'est Patricia; ce n'est pas une messe, ce serait plutôt une fête entre amis, sous une tonnelle. Sa langue est drue, la saveur de ses vers qui coulent gouleyants a goût de fruits mûrs.La femme qu'ilcélèbre n'est pas une idole, elle est tour à tour la soeur, l'amie, la confidente, l'amante, la compagne semblable et mystérieuse, égale et différente, avec qui il est bon de faire son métier d'homme et auprès de qui il est beau de se réveiller. Fut un temps, pas si lointain, où il était de bon ton de fustiger cette poésie du quotidien et de l'amour, de se moquer d'une certaine forme de lyrisme. Francis Combes leur répond par avance: "A tant chanter l'amour à la fin c'est assez/ Pensent certains, la chose est pour eux dépassée/ Le lyrisme à leurs yeux est un type à descendre/ A coller contre un mur pour s'en débarasser/ Mais il a la vie dure et il nous survivra/ Et ceux-là qui l'enterrent seront vite oubliés." Saluons avec lui le retour en poésie de l'amour éternel et du lyrisme sui l'exprime.
Alain-Jacques Lacot
Magazine Littéraire. Janvier 2012
L'aubépine. Francis Combes. ed Le Préau des Collines. 112 p. 13 E
Regarde où l'ennemi t'attaque; c'est souvent son propre point faible.
Sur le clavier du ciel où chantent les étoiles
Lancé sur le trapèze impossible des voiles
Dans la sciure des blés habitée des perdrix
Gagnant le toit la tonte épaisse de la nuit
Tout le jour en danger mais retrouvant des ailes
Pour dépasser le monde obscur la citadelle
Est-ce mon ombre ou la lumière sous la pluie
Je ne sais qui je suis prisonnier de ces routes
Avec mon sang qui coule à la mer goutte à goutte
Avec ces larges plaies aussitôt pardonnées
Et mon coeur de plein vent ma grange abandonnée
Je vais. J'ai rendez-vous sur les plateaux sans âge
Avec de vieux béliers frappés à mon image
Enfin je vais bodir sous les cornes du feu
Rien ne ressemble moins à tes yeux que mes yeux
Homme étrange occupé de besognes terrestres
Qui couvre de limons la blancheur du charnier
Jamais tu n'oseras, usant tes propres cendres
Jeter sur le tableau les mots qui font comprendre
Que tout l'amour du monde est à imaginer.
Que la paix règne sur la terre
Que l'amour règne parmi les hommes
Que la joie soit dans les coeurs
A l'abri des hameaux, de la mer familière et des routes,
Je foule en votre honneur les prés. Au moment du regain,
Nous les foulions de même et nous rivalisions dans le sillage des fougères,
Portés par un désir qui naissait identique à son achèvement!
Ah!J'embrassais en vous la bonté de la mer et des branches!
J'attendais que le plein de la nuit dévoilât votre intense tiédeur.
Le vent reprend sa course. Il fascine et soulève les cendres!
Ses trophées, commençant à pourrir sous l'empire des murs,
N'ont rien de comparable à ce qui demeurait entre nos mains réunies
Tandis que, près des bois, aux confins de la terre et des eaux
Avant de s'éloigner, par un sentier mouillé, d'une funeste rive,
L'hiver me confirmait dans la possession d'un arbre abattu!
Les chênes d'autrefois sont couchés dans des tombes humides.
Ils engendrent l'horreur, ils souillent, souverains, un enclos sablonneux
Où les roses jaunies, le défi délicat, l'aventure des feuilles
Recèlent tendrement le nid d'une nudité.
Le poète ne doit pas faire oublier l'homme, mais l'homme le poète.
Verlaine? Il est dressé sur l'herbe
Lyre et palme dans le dos, Verlaine,
En buste, au sommet de trois bons
Mètres de pines granitiques où se tordent
D'improbables muses affolées d'être
Prises en sa compagnie sous le regard
De promeneurs peu regardants
Aux combats du plaisir. Le hurlement
Aer d'une moto trouble soudain
Le petit chant de pluie sur les patanes
Et châtaigniers, un rayon de soleil
Tranche en clair-obscur le massif rouge
Et vert, et Verlaine renfrogné rêve encore
L'air qui ferait tout tenir ensemble.
Il faut être seul pour être grand. Mais il faut déjà être grand pour être seul